L’étranger (version 1)

Temps de lecture : 2 minutes

J’avais marché toute la journée dans le froid, la pluie et la gadoue. Épuisé, je rêvais d’un endroit au chaud pour me requinquer quand j’aperçus au loin une lumière.

Oserais-je toquer à la porte d’inconnus avec ma mine d’étranger ?

Je prends mon courage à deux mains et me décide à gratter à la porte-fenêtre. Peu après, apparaît une jeune femme dans l’entrebâillement de la porte. Elle me dévisage longuement et marque un temps d’arrêt, surprise.

– Bonsoir. Que se passe-t-il ? D’où viens-tu ?

Je saisis ses paroles mais ne parle pas sa langue.

– As-tu froid ? Comme tu es trempé ! Pourquoi as-tu la tête dans les épaules ?

Un peu de tenue, me dis-je. J’esquisse un mouvement, me redresse, jette un rapide coup d’œil dans la pièce où j’entrevois une cheminée avec des bûches rougeoyantes. Le grand luxe, ce palace cinq étoiles, c’est là que je dois passer la nuit.

Allez, courage ! Je m’avance sur le seuil de la porte, me penche dans la pièce. Un effluve de poulet grillé titille mes narines : le repas en plus de la nuit, ce sera top. Zut ! Je lui ai fait peur. Elle barre le passage avec son pied, le regard assassin.

C’est le moment où jamais de faire amende honorable et de jouer sur les cordes sensibles, comme je sais si bien le faire : regard séducteur, implorant, en la fixant droit dans les yeux jusqu’à ce qu’elle baisse les paupières.

Waouh ! On dirait que ça marche. Elle libère le passage, prend de grandes inspirations, serre les lèvres, hoche la tête. Je continue à la fixer, en me faisant tout petit, tout frêle, ramassé sur moi-même.

Elle ouvre enfin la porte.

– Tu as l’air si fatigué ! Entre donc. Tu pourras passer la nuit ici.

Hourra ! Je file vers la cheminée, m’allonge sur une couverture et … ronronne.

Brigitte DANIEL ALLEGRO – Castelnau d’Estrétefonds, le 6 avril 2021

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